Ensemble Transmission

2015/05/01

Chapelle historique du Bon-Pasteur, Montréal

L’évangile selon Jean relate comment suite au Commencement, « le Verbe s’est fait chair·», à travers l’incarnation de la parole, du·logos·divin, en la personne·du Christ, le fils de Dieu. En anglais, ce passage est parfois traduit par … and the Word was made flesh. En inversant la position des mots-clés de cette phrase, j’ai voulu suggérer l’idée selon laquelle le mot, l’idée ou le verbe surviennent bien souvent, à l’inverse et dans notre existence de simple mortel, à la suite d’une expérience du corps, des sens, du senti. En effet, s’il est vrai que nos idées savent nous procurer des sensations inédites, il n’est pas plus faux de reconnaître notre tendance naturelle à réfléchir sur - et à partir de nos sensations, de manière à se les approprier, à les apprivoiser au niveau de la conscience, de l’intellect, de la raison. De là vient qu’il est difficile, en général, de laisser le domaine des sensations être simplement ce qu’il est, dans sa profusion, sa diffusion et sa confusion. Or, il est intéressant de constater que le récit divin suggère un parcours inverse, c’est-à-dire que de la clarté du Verbe, une incarnation humaine semble avoir été le moyen de rejoindre la sensibilité du mortel, laissant ainsi, d’une certaine façon, le domaine du logos·comme hors de portée, inaccessible, dans le domaine de l’indicible et de l’ineffable - précisément là où la musique se joue. Ainsi, dans … and the flesh was made word, j’ai voulu explorer un matériau tout en textures, en tissus sonores conçus davantage comme·tactiles, et moins·discursifs. En phase avec cette poétique, j’ai utilisé les structures formantiques des voyelles de la langue française comme modèle harmonique de base, comme si la pâte sonore se trouvait modelée par des sonorités linguistiques. Finalement, j’ai abordé l’aspect textural en explorant, un peu à la manière d’une étude, différentes catégories de la spectromorphologie de Denis Smalley, telles que la granulation, l’itération, les flux sonores, la périodicité, autant de concepts qui nous gardent plus proches de la matérialité du sonore que de son potentiel discursif.· ··

 

The Gospel according to John reports how following the Beginning, “the Word became flesh”, through the incarnation of the Word, the divine Logos, in the person of Christ, the son of God. In English, this passage is also sometimes translated by … and the Word was made flesh. By reversing the position of the keywords of this sentence, I wanted to suggest the idea according to which the word, or the idea very often occur, contrary and in our existence of ordinary human being, following an experiment of the body, felt through the senses. Indeed, if it is true that our ideas can trigger new feelings in us, it is not falser to recognize our natural tendency to reflect on - and starting from our feelings, so as to adapt them, to tame them on the level of the conscience, intellect, the reason. From there comes that it is difficult, in general, to let the field of the feelings be simply what it is, in its profusion, its diffusion and its confusion. However, it is interesting to note that the divine narrative suggests a course reverses, i.e. starting from the clarity of the Verb, a human incarnation seems to have been the means of reaching the sensitivity of the mortal, thus leaving, in a certain way, the field of the logos as out of reach, inaccessible, in the field of the inexpressible and unutterable -